mardi 30 décembre 2008

Longue biographie

UN EXEMPLE EN OCCIDENT
"RENE GUENON"




TABLE DES MATIERES:
1- UNE VIE EN ESPRIT par: "Jean-Claude Frère"
2-Des formes extérieures à la révélation intérieure
3-A la recherche d'un savoir
4-Des expériences décevantes mais nécessaires
5-L'apprentissage de l'expérience créatrice
6-Un militant de l'éveil métaphysique
7-Initiation à la vérité de l'Islâm
8-Un mariage paradoxal? Plutôt dépassant le paradoxe
9-Le professeur et ses marottes orientales
10-Le premier ouvrage base de l'ensemble
11-Introduction à la critique de l'âge sombre
12-Lutte contre l'influence des pseudo-spiritualistes
13-La nécessité du rapprochement avec l'orient
14-Une pénétration accrue de la métaphysique orientale
15-Oppositions entre les évolutions possibles
16-Mais à quel niveau se manifeste la connaissance?
17-Le roi du monde Mythe ou réalité?
18-Autorité spirituelle contre pouvoir temporel
19-La tradition vécue en Egypte
20-1945: les signes du règne de la quantité
21-Réaliser l'oeuvre dans la vie
22-Le corps à même le sable, un autre rivage

1-Une vie en esprit:
Il est des esprits qui bouleversent le cours de leur temps et secouent la succession des idées sans que pour autant ils deviennent les étincelantes vedettes des engouements fugitifs. René Guénon est de ceux-là. Humble et effacé, ayant mené une vie silencieuse, il semble passer lentement d'un clair obscur à la nuit complète sans s'occuper beaucoup des figures de son époque et des recettes qui assurent la célébrité. Ce solitaire amoureux éperdu des grandes perceptions spirituelle fut-il un philosophe? Assurémént pas. Il contempla la philosophie et put, chose insigne et légitime dans son cas, se permettre d'en sourire. Fut-il un orientaliste de talent, mais simplement un orientaliste quand même; un de ceux qui ont l'Inde facile? Non point, il "aperçut" l'Orient, et s'y arrêta bien moins qu'on se plait à dire. En fait, il le survola, mais le survola comme un aigle: en oiseau de proie qui plonge chaque fois qu'il découvre la victime qui assurera son alimentation. De toute façon son propos couvrait trop de choses et dévoilait trop de richesses pour qu'il soit possible d'en faire l'homme d'une spécialité. Nul "dada" ne fut son domaine. La synthèse de l'homme et de l'univers seule le préoccupait réellement. Et, ayant peut-être découvert des arcanes de la grande mécanique céleste il put bientôt se moquer de nos agitations, de nos concepts sitôt remplacés par d'autres concepts tout aussi éphémères. Son style est celui des rois et des mages (toujours il courtise le "nous"). Son pluriel est celui de la majesté incontestable. Guénon ne propose pas, ne suggère pas. Il affirme. Sa devise serait bien celle de quelques Brahmane védique: "connaître et imposer". Nul dogmatisme pour autant, mais l'assurance de celui qui revient d'un voyage étonnant. Un voyage pendant lequel il aurait été transporté sur une montagne d'où il aurait pu découvrir, de l'extérieur enfin, les choses des astres pour, une fois revenu, pouvoir en rire délicieusement et assurer comme fait inexorable ce qui est gros encore dans le ventre de l'avenir. Car le chemin de Guénon passa par un sentier où l'instant dépasse le futur pour rejoindre le passé.


Peu d'oeuvres effacent avec autant de vigueur la figure de leur créateur, René Guénon. Mais peut-on même imaginer l'enfant qu'il fut? Nulle part ses angoisses ne transparaissent; toujours sa plume, qui est celle d'un des grands maître du style au vingtième siècle, glisse vers les contrées qui ne concernent pas le corps et ses caprices. Le monde est ébranlé par les plus violentes secousses que la civilisation ait eu à subir; pourtant l'oeuvre guénoniène se continue impavidement: il est là, sans colère, étranger à jamais aux caprices de l'actualité. Il a trente-et-un ans quand la sainte Russie, devenant la République des Soviets met fin au monde des certitudes et intronise le temps de l'angoisse. Il a cinquante-neuf ans quand la connaissance à rebourgs inonde le ciel de deux villes du Japon et que le néant nucléaire boucle la boucle des mythes et suscite, par son affirmation pratique de la désintégration matérielle, le vertige et l'attente de la réintégration en Dieu. Certes ces ouvrages sont là pour marquer les années, mais en aucun cas ils ne forment une maturation suivie et réellement chronologique. Dès son premier livre publié, "l'introduction générale aux doctrines hindoues", sa formation est structurée comme elle le demeurera jusqu'à sa mort. Rien n'aura évolué au sens fort de ce terme. Il y aura eu des approfondissements, mais l'âge de l'auteur disparaît devant sa création. René Guénon immole le temps pour que demeure l'immédiat de la réalité métaphysique. Tout son propos sera décidément construit dans cette oblation faite à l'immédiateté de thèmes à la fois immémoriaux et intemporels. Ses historiens, biographes ou hagiographes, ont bien mentionné ses origines profondement françaises et son appartenance ancestrale à ces pays de la Loire qui sont comme la quintessence de notre civilisation. René Descartes et René Guénon sont issus du même terroir; le premier naquit en Touraine et le segond en terre blésoise. Il n'y a là de hasard qu'en apparence; en réalité les deux formes d'intelligences sont proches et appartiennent à la même discipline intérieure, à la même horreur des formules vagues et des dissertations éperdues. La lumière austère de la Loire nous offre des écrivains épris d'absolu, pas un absolu facile, et surtout de dépouillement. La mystique n'est nullement dans le tumulte et les formules rodomontantes; elle réside dans l'absence de tout attrait extérieur à l'objet même de la quête, qui, en lui-même, s'évanouit dans la conscience ultime de l'être qui pénètre tout l'univers. Ni St Jean-de-la-Croix, ni René Guénon ne nous contrediraient. On nous parle trop de mystique, parce que le monde de la mystique est défunt; toujours l'on parle d'une chose, d'une entité, quand déjà elle n'est plus. Ce cahier sur Guénon nous offre bien la chance de pouvoir réajuster quelque peu les mots et leur sens. Trop de galvaudages proposèrent des vues inconsistantes sur les plus profondes réalités. Trop d'écrivains pris de spasmes névrotiques crurent "réinventer" un langage inspiré parce qu'ils étaient incapables de savoir encore ce que penser veut dire.

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